Rev. archéol Ouest, 8, 1991, p. 123-157.

UNE FORTERESSE DU Xe SIECLE: LE CAMP DE PERAN A PLEDRAN (Côtes d'Armor)

Jean-Pierre NICOLARDOT* et Philippe GUIGON*

Les structures d'habitat présentant des fossés et levées à caractères défensifs, à quelques époques qu'elles appartiennent, en marquant fortement leur empreinte dans le paysage, ont de tous temps intrigué. Dès le XVIe siècle (Harmand, 1961), et pendant tout le XIXe siècle, elles ont été considérées comme des témoins hérités de la Gaule romaine et leurs études ont presque toujours été menées en tentant de les rapprocher des descriptions des textes de César. Pendant les deux premiers tiers du XXe siècle, les camps, avec le développement de la notion d'époques protohistoriqiies, ont été le plus souvent datés du Deuxième Age du Fer, de la période marquée par la fin de l'indépendance gauloise. Il faut attendre les travaux de terrain des trente dernières années du XXe siècle pour voir admettre, dès le Néolithique moyen, l'apparition de fortifications fossoyées de terre, de pierre et de bois (IVe millénaire avant J.-C; Nicolardot, 1988). Ces mêmes travaux ont montré qu'elles ont acquis pratiquement tous les perfectionnements techniques au Bronze final et que finalement, mise à part l'architecture défensive urbaine gallo-romaine avec l'emploi de maçonnerie en gros et petit appareils alliant souvent moellons de pierre et arases de brique (Blan- chet, 1907), les procédés et modes de constructions des remparts des enceintes en milieux ruraux resteront sensiblement les mêmes du 1er Age du Fer à l'an mil (Guigon, 1990/b). Même la tour de bois sur motte ceinturée d'un fossé, des XIe et XIIe siècles, est plus proche des camps fortifiés préhistoriques et

riques par les moyens de construction empiriques nécessitant quelques charpentiers expérimentés et de nombreux manoeuvres, que des châteaux de pierre des XIIIe et XIVe siècles qui répondent à une problématique précise due à l'évolution de l'armement et des tactiques militaires et qui demandèrent le concours du savoir de maîtres d'oeuvre compétents que l'on peut qualifier d'architectes et d'ingénieurs (Mazard, 1989, p.36).

Historiographie des travaux sur le camp de Péran

L'enceinte fortifiée de Péran (cadastre 1957, section G, parcelles n° 64 à 69; coordonnées Lambert Zone I: Ax= 221,75, Bx = 97,15, Z = 160 m), sur la commune de Plédran, juchée sur les premières hauteurs qui dominent la baie d'Yffiniac, au sud de St-Brieuc (fig. 1), est un site archéologique reconnu depuis plus de deux siècles: J. Geslin de Bourgogne (1846) rapporte que «plusieurs années avant la Révolution, divers ustensiles de cuisine, d'une forme ancienne furent tirés de terre vers le centre du camp et vendus ou donnés au Recteur de Plédran qui les utilisait encore, il n 'y a pas si longtemps».

Les premiers travaux dont il est fait mention dans le journal Le Messager de Dinan se situent entre 1820 et 1825: entrepris par A. Maudet de Penhouët, F. Rioust de PArgentaye et Le Court de La Villethassetz, les résultats de ces fouilles n'ont, semble-t-il, jamais fait l'objet de publications.

Manuscrit accepté le 30/09/1991.